S’entrainer Une ou Deux fois par jour ?

par | Mai 6, 2022 | Conseils pour l'haltérophilie | 0 commentaires

Dans de nombreux sports, les sportifs d’élite augmentent la fréquence d’entraînement afin d’atteindre des gains de performance maximaux dans leur discipline. Les haltérophiles ne dérogent pas à la règle. Il est courant chez les haltérophiles d’élite de s’entraîner deux fois par jour, une séance le matin et une séance l’après-midi. Ce comportement est principalement basé sur la tradition et sur la culture de l’haltérophilie. Par exemple, certains haltérophiles utilisant la méthode Bulgare, s’entrainaient jusqu’à s’entrainer 8 fois par jour ! mais revenons-en à deux fois. Pour cette méthode, de nombreuses stratégies sont employées, comme par exemple séparer les deux mouvements classiques (arraché et épaulé-jeté) afin de pouvoir être en meilleure forme pour chacun d’entre eux. L’objectif est d’améliorer la récupération tout en s’entrainant plus. Obtenir davantage de pratique avec les mouvements est important en haltérophile en raison de leurs technicités.

 

Prenons l’exemple d’un lanceur de baseball qui veut améliorer ses compétences en lancer et qui doit donc lancer un grand nombre de balles, souvent des milliers par semaine, dans le cas des lanceurs professionnels. S’il veut devenir plus rapide, plus précis et plus puissant, il va devoir faire beaucoup de répétitions. Dans le cas de l’haltérophilie, s’entrainer deux fois par jour repose sur le même raisonnement : un grand nombre de répétitions est nécessaire pour développer une maîtrise de la compétence qu’est l’haltérophilie. Cependant, peu ou pas de recherches ont été faites à ce sujet. Je voudrais passer en revue le seul article que j’ai trouvé qui a enquêté sur ce sujet et bien évidemment, vous donner mon avis.

 

Hartman et al (2007) ont comparé les effets de séances d’entraînement deux fois par jour et une fois par jour chez des haltérophiles masculins de niveau national américain. Dix haltérophiles compétitifs (l’âge moyen était de 20 ans) avec une masse corporelle de 92,6kg à plus ou moins 23,6 kg, qui avaient 4 à 7 ans d’expérience en haltérophilie ont été assignés au hasard pour s’entraîner une ou deux fois par jour. Les haltérophiles se sont entraînés les lundi, mardi, jeudi et vendredi. Le groupe « deux fois par jour » avait des séances le matin et l’après-midi. L’expérience a duré trois semaines et des mesures de « la force isométrique d’extension du genou (ISO), de la section transversale musculaire, de la puissance maximale du saut vertical, de la concentration hormonale au repos, de l’activation neuromusculaire (EMG) et des performances en haltérophilie ont été prises avant et après.

Hartman a constaté qu’il n’y avait aucune différence statistique significative pour aucune des variables testées, mais a noté une augmentation de 2 % de l’ISO, une augmentation de 10 % sur la lecture EMG (20,3 % contre 9,1 %), une augmentation de 4 % pour la testostérone et une lecture négative pour le rapport testostérone/cortisol pour le groupe « deux fois par jour » par rapport au groupe « une fois par jour ». Bien que ces chiffres semblent importants, ils n’étaient pas significatifs, ce qui signifie que les auteurs ne peuvent pas exclure que les résultats aient pu être aléatoires. Ils concluent : « L’augmentation de la fréquence d’entraînement quotidienne chez les haltérophiles masculins de niveau national n’a entraîné aucun avantage supplémentaire. En revanche l’augmentation de l’activité ISO (extension du genou) et EMG (activation neuromusculaire) pour le groupe « deux fois par jour », pourrait justifier la division de la charge d’entraînement dans le but de réduire le risque de surentraînement ».

 

Je pense qu’il faut prendre les résultats de cette étude avec précaution. Voici pourquoi selon moi :

 

1- L’arraché moyen des participants était de 111kg à plus ou moins 23,1kg pour le groupe « une fois par jour » et 114kg à plus ou moins 28,5kg pour le groupe « deux fois par jour ». Concernant l’épaulé-jeté, la moyenne était de 139kg à plus ou moins 39,2kg pour « une fois par jour » et 136kg à plus ou moins 32,5kg pour « deux fois par jour ». Bien que les participants soient considérés comme des haltérophiles américains d’élite, selon les normes internationales, ils devraient être considérés comme des haltérophiles intermédiaires. Cette distinction est importante car la charge supplémentaire d’une deuxième séance d’entraînement est probablement mieux adaptée aux athlètes beaucoup plus expérimentés qui ont eu le temps de s’adapter à une charge accrue au fil du temps. Il y a une grande différence entre ce qu’il faut pour arracher 110-130 kg et ce qu’il faut pour arracher un record du monde !

 

2- Les participants se sont entraînés quatre fois par semaine, ce qui n’est qu’un plan d’entrainement parmi tant d’autres. Les résultats auraient-ils été les mêmes s’ils s’entraînaient 5 ou 6 jours par semaine comme la plupart des équipes internationales d’haltérophilie d’élite ?

 

3- La charge d’entraînement totale a été normalisée pour s’assurer que les deux groupes aient soulevé autant. La charge totale d’entraînement était d’environ 7000 kg le lundi, 5000 kg le mardi, 5500kg le jeudi et environ 6000 kg le vendredi. En d’autres termes, le plan d’entraînement était lourd le lundi, léger le mardi, modéré le jeudi et modéré + le vendredi. Les résultats auraient-ils été les mêmes s’ils avaient modifié la charge totale d’entraînement avec 2 séances lourdes par semaine par exemple ?

 

4- Hartman explique le programme que les haltérophiles ont fait (voir la photo ci-dessus). Tout bien considéré, le programme est intéressant dans le sens où le premier jour n’a pas d’arraché ni d’épaulé-jeté et comporte pourtant deux variantes de squats (front et back). Les athlètes ont effectué plus de squats que de mouvements techniques, ce qui est assez étrange si vous testez une différence de performance sur les mouvements d’haltérophilie. Les résultats auraient-ils été différents s’ils avaient suivi un programme différent dans lequel ils arrachaient, épaulaient et jetaient plus fréquemment ?

 

5- L’expérience est de courte durée (3 semaines). Peut-être que les résultats auraient été significatifs sur une période testée plus longue. Après tout, la plupart des meilleures équipes d’haltérophilie passent plus ou moins 10 mois/an dans des camps d’entraînement à s’entraîner deux fois par jour. Une étude plus longue aurait été intéressante.

 

6- Outre le fait que les athlètes soient de niveau national, nous ne savons pas grand-chose de leur expérience à l’entraînement. Être habitué/adapté à l’entraînement deux fois par jour est important si vous voulez voir une différence.

 

7- La lecture des taux hormonaux aurait dû être plus précise. L’auteur déclare : « Les échantillons de sang ont été obtenus après un jeûne de 8 heures et 1 jour de repos complet, car le but du test était de faire la distinction entre les changements aigus et chroniques de la testostérone totale et du cortisol ».

Ce type d’intervention ne donne que des informations sur le statut hormonal à un moment donné. Parce que les hormones fluctuent, je pense que les échantillons auraient dû être prélevés plus d’une fois afin de voir l’évolution de la fluctuation hormonale.

 

Conclusion

 

En raison des 7 préoccupations que j’ai abordées, vous devez savoir que dans ces conditions d’entrainement particulière, il ne semble pas y avoir de différences significatives entre la formation « une fois par jour » ou « deux fois par jour ». D’après moi, le fait de vous entraîner une ou deux fois par jour doit être basé sur d’autres variables comme la quantité de repos nécessaire, les méthodes de récupération, le nombre de séances, l’accoutumance à un tel type d’entraînement, et le niveau de stress général (Peut-être que s’entraîner deux fois par jour n’est pas optimal si vous devez travailler et gagner votre vie).

 

Encore une fois d’après moi, l’haltérophile débutant ou intermédiaire ne devrait pas se préoccuper de s’entraîner deux fois par jour. Trois à cinq séances d’entraînement par semaine suffisent. Au fur et à mesure de votre progression, vous pouvez ajouter des séances si vous le souhaitez mais n’oubliez pas que parfois, moins c’est plus.

Et c’est particulièrement vrai en haltérophilie.

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